Après avoir baroudé une trentaine d’années autour du monde pour y faire nager quelques leurres, l’envie de retourner pêcher l’un des trois rois du top water me titille à nouveau. Cette fois-ci ce sera le snakehead ! Le fameux poisson à la tête de serpent ! Dit « le fantôme » !
Si un poisson porte bien son nom, c’est bien celui-là…
Après deux voyages en Thaïlande plus ou moins réussis, nous projetons avec mon pote Martin (dit « petit golum ») un trip de 15 jours dans le nord du pays, direction « Chiang Mai ».
Mon premier voyage, il y a dix-sept ans déjà, m’avait littéralement enchanté. Le second un peu moins, surtout dans sa première partie. Un pseudo guide bien connu nous avait envoyé pêcher dans des trous d’eau plus ou moins carrés au milieu des buildings ou mieux encore en bordure de zones industrielles… ce type de prestation n’ayant pour moi qu’un intérêt très très limité. Mis à part le fait de pouvoir capturer en général à l’appât, des poissons « surdensitaires » dans des marres plus ou moins lugubres et sans aucun intérêt sauf peut-être d’enrichir une collection de prises hétéroclites n’existant pas à l’état naturel sur ce secteur mais que l’IGFA valide d’ailleurs sans aucun problème en tant que record du monde… perdant de fait à mes yeux, toute crédibilité !!!!
Nous on veut du sauvage ! Des vrais fishs, du rêve quoi ! Deux semaines doivent nous permettre de trouver notre bonheur sur place. Direction le nord… là où il paraît de gros spécimens hantent les différents lacs de la région. Arrivés à Bangkok, la ville est immense. Pleine de bruits et de gens qui s’agitent dans tous les sens de jour comme de nuit. Perso j’adore !
Le train pour Chiang Mai part demain après-midi, 8 € et quinze heures de voyage plus tard, nous arrivons de bonne heure dans la deuxième ville de Thaïlande. Le contraste est saisissant avec la capitale : 20 ° d’écart. On se pèle grave !
Les chaussettes, pulls et blousons ressortent du fond de nos sacs à dos. Un truc de dingue. Il neige à 200 km d’ici, du jamais vu ! Pour preuve, les voitures vendues ici n’ont pas de chauffage. Doudounes, pulls et chaussures s’arrachent dans les rues de la ville, c’est la cata.
Avec l’aide de notre charmante hôtelière, nous trouvons un plan pêche dans l’un des soit-disant hauts lieux du snakehead. Départ demain matin. Une heure et demi de taxi plus tard, c’est parti pour quatre jours de pêche. Nous somme sur place en fin de matinée. On se les pèle et il pleut des cordes…
Le lac a perdu au moins 15 mètres par rapport au niveau où il devrait être à cette époque. La sécheresse et les monocultures qui sévissent ici depuis deux ans ont eu raison de la rivière qui l’alimente. Sur les berges on découvre avec effroi les ordures jetées là depuis longtemps et que les niveaux au plus bas ont découvert (frigos, caisses en plastique et divers autre débris de notre société). A mon avis, on ne va pas rester ici longtemps.
Mais comme nous sommes là, nous essayerons quand même demain matin, sans conviction.
Après une nuit polaire sous trois couches de fringues, départ pour la pêche. Comme prévu, pas un chapeau de vendu, mis à part quelques vieux filets abandonnés là comme le reste, rien, plus que rien même…
Bon, 4 jours ici ça ne va pas le faire, c’est décidé on rentre ! Grosse désillusion ! Outre le fait d’avoir vite compris que nous avons fait fausse route, quelle déception ! D’une manière générale, trop de touristes ,trop de pollution visible et invisible. Ce n’est vraiment pas l’image idyllique que l’on peut se faire d’un paradis tropical…
Bienvenue au grand banquet de la consommation !
Ça sent la déprime… 2 temples plus tard, c’est décidé, il nous reste 9 jours… on dégage !
Après quelque heures de recherche sur la toile, Martin l’a retrouvé ! 5 ans auparavant nous étions partis pêcher un lac du sud de la Thaïlande. La pêche avait été difficile, mais l’endroit autant que je m’en souvienne était splendide.
Je contacte Nick, un jeune anglais qui dirige une toute jeune agence de tourisme. En discutant avec lui, il nous propose d’essayer une nouvelle formule pour lui. Foutu pour foutu, la décision est prise. 5 jours de pêche, cap au sud !
Billets d’avion en poche direction Phuket où normalement on nous attend. Arrivés à 9 heures du matin, notre chauffeur est là, pancarte à la main et un gros 4×4 flambant neuf qui nous attend. Deux heure et demi plus tard, nous faisons un stop à l’agence pour rencontrer Nick. Il nous donne le programme, 5 jours et demi de pêche au snakehead.
Tout baigne, la pirogue pour le transfert est là juste pour nous. Sac à dos et bazooka chargé, nous voilà partis pour 2 heures de navigation. Au fur et à mesure que nous nous enfonçons dans les dédales du lac, la nature prend sa place. Les paysages qui déroulent devant nous sont simplement magiques.
Arrivés au camp, tout est nature. Nous sommes en plein milieu de la réserve. Chasse et pêche sont strictement interdites, No kill obligatoire !
Notre installation se fait dans un petit bungalow flottant en bambous. Le bateau est amarré dans notre future salle de bain . Un genre de paradis en somme.
Il est midi, petit tour dans la partie commune où nous attend un repas typiquement thaï. La prochaine fois se sera « no spicy please » !
Un anglais très distingué et son fils nous invitent à leur table. Ils sont aussi là pour le snakehead et sont des habitués des lieux. Ils viennent ici depuis 5 ans et connaissent la vie du lac par cœur. Une chose est sûre : le snakehead en Thaïlande c’est ici que ça se passe ! The place to be !
Ils nous en apprendront beaucoup sur les saisons et le comportement du poisson. Les très gros spécimens ici il y en a, pour preuve, un magnifique « Shadow » d’une bonne dizaine de kilos accompagnera notre repas quotidien durant tout le séjour.
Il garde un banc de pseudo brèmes attirées par les restes de nos assiettes…
Les très gros spécimens, nous expliquent nos amis, sont en général actifs lorsque après la fraie, ils surveillent leur progéniture. Ce sont ces poissons là que nous voyons sur les photos en général avec leur superbe livrée verte, violette ou bleutée. Cette période correspond au mois d’octobre, novembre et plus rarement en décembre. Les couleurs prononcées des poissons à cette époque, permettent aux juvéniles d’avoir un repère visuel en cas de danger.
Le problème, outre le fait de pêcher sur les frayères (les poissons défendent leur progéniture et attaquent à peu près tout ce qui bouge), est que les eaux du barrage sont normalement très hautes après la saison des pluies. Le risque majeur est d’avoir tout simplement des snakeheads dans la forêt immergée, donc impossibles à approcher.
A partir de mi-novembre l’eau du barrage a commencé à descendre lentement en s’éclaircissant peu à peu. La pêche devient à nouveau possible avec une forte probabilité de rencontrer des spécimens ayant frayé plus tardivement (un peu à la manière des black-bass de chez nous).
A partir de décembre, l’eau est devenue limpide. Le barrage baisse un peu plus chaque jour. La pêche se pratique alors sur les bordures là où les poissons aiment se poster à l’abri des arbres morts et frondaisons tombés dans l’eau. La baisse des niveaux, laisse petit à petit également des zones de faible à très faible profondeur appelées « shallow ».
Ces zones sont très propices car le poisson y vient pour chasser en général tôt le matin, mais également en fin d’après-midi pour surprendre les bancs de petites perches de jungle et autres batraciens.
Cette saison dure à peu près jusqu’à fin mars. Avec la baisse des eaux, nos amis s’éloignent petit à petit des tributaires et nombreuses criques situées dans les parties les plus reculées pour se décaler sur les postes situés plus à l’intérieur du lac.
A partir d’avril, la pluie fait gentiment son retour, en général en fin d’après-midi et bien souvent la nuit. L’eau afflue à nouveau des montagnes environnantes, alimentant les rivières qui se jettent dans le lac. L’effet est immédiat, attirées par l’oxygénation de l’eau, des nuées de petits poissons remontent du lac pour frayer dans les prairies à nouveau immergées. Ils entraînent dans leur sillage toutes les différentes espèces de carnassiers qui se trouvent dans le lac (Snakheads, Perches de jungle, Masheers, et autres silures…).
L’eau se teinte au fur et à mesure qu’il pleut. Mais c’est à ce moment là que la pêche devient top, car trahis par le peu de profondeur on peut distinguer facilement le déplacement des carnassiers en chasse !!!
A partir de fin juin, cela se gâte, les pluies deviennent de plus en plus abondantes et l’eau se trouble sérieusement.
Objectivement, la saison démarre en novembre pour se terminer au plus tard fin juin. Nous, avec « le courlis », nous sommes début février, l’eau est d’un bleu turquoise et limpide. Les eaux sont basses, la période sûrement la plus difficile pour la pêche. Mais nous en savons déjà un peu plus. D’ailleurs, deux japonais venus la semaine dernière, ont paraît t-il bien réussi…
En fait, suivant l’endroit où l’on se trouve sur la planète et le biotope dans lequel nous somme, les vérités énoncées plus haut, ne sont pas forcément les mêmes. Mais ici, c’est comme cela que ça se passe bien que, comme nous le savons tous, le temps change un peu partout sur la planète. L’épisode Chiang Mai nous en a donné un bon exemple !
Nous préparons notre matériel après un déjeuner bien épicé, en suivant les conseils avisés de nos nouveaux amis. 2 cannes Megabass casting pour moi, deux cannes spinning Tenryu travel pour le courlis.
Buzz frogs, frogs, stickbaits et crankbaits sont de sortie. A bord de notre longtrail pétardant et peu stable, nous voilà partis pour notre première soirée de pêche au mystique « shadow » ! Un quart d’heure plus tard ça y est, nous y sommes.
Le bruit du moteur éteint, le cadre se découvre à nous. C’est magnifique, tout transpire la nature, pas de détritus, pas de filet, pas d’ humain. Juste le bruit et les odeurs de la forêt. Le lac est un miroir d’un bleu profond….
Ici et là des chasses de perches de jungle éclatent subitement et disparaissent aussi vite. Déjà deux ratés pour moi, ça démarre mal ! Ici, elles peuvent atteindre les quatre kilos.
Juste au dessus de nous des singes se baladent de branche en branche, sans avoir l’air effrayés plus que ça par notre présence, normal car ici les hommes les protègent donc pas de raison d’avoir peur. En gros si le paradis existe, ça pourrait ressembler à quelque chose comme ça…
Une heure de déambulation le long des berges plus tard, pas un chapeau de vendu.
Jusqu’au moment où venant de nulle part (surgit un aigle noir…), Martin se prend une attaque de barbare et plus rien. On se regarde… on n’a rien compris, sauf qu’il manque le tiers arrière de sa grenouille !
Cisaillé propre et net ! Bienvenue mes amis !!
Dix minutes plus tard, c’est mon tour. Mais ce coup-ci surgissant d’un bosquet de bambou tombé dans l’eau, la bête coffre mon leurre pour de vrai ! Ferrage de géorgien ! Il est pendu !
Direct au fond ! Mais bon, sur tresse de 50 lb, il ne fait pas trop le malin. C’est un Giant Snakehead, un vrai, le premier !
Nous rentrons contents et heureux d’avoir changé radicalement notre fusil d’épaule pour venir ici. Après une bonne nuit et un petit déjeuner, nous repartons vers une nouvelle zone dite de « shallow »…
Le spot est encore plus beau que la veille au soir.
Ce matin le vent est nul. La brume reste accrochée à la surface de l’eau.
Quand tout à coup, à 25 mètres de nous apparaît un jeune éléphant sans chaîne ni kornak, énorme !!! Juste là, devant nous, il nous surveille du coin de l’œil sans trop s’occuper de notre présence.
Nous resterons une demie heure à l’observer et tant pis pour la pêche, on verra plus tard. Un spectacle comme celui la, ça ne se rate pas…
Nous en reverrons à deux reprises mais pas d’aussi près. Instant magique et privilégié, comme nous réserve souvent la pêche dans certains endroits du monde. Mais malheureusement de plus en plus rare…
Ce matin c’est deux snakeheads et quelques perches qui viendront se jeter littéralement sur nos leurres dont un magnifique Cobra snakehead à la livrée improbable.
Moins gros que la Giant, il est présent ici en nombre avec de très jolis spécimens pour son espèce qui dépasse rarement les deux kilos pour des poissons records pouvant atteindre les 4 kilos maximum, mais sa robe est sublime ! Nous en attraperons une bonne dizaine durant notre séjour.
Cette espèce affectionne particulièrement les zones de « shallow » ( faible profondeur). Ils se trahissent souvent par leur déplacement le long de la bordure où ils traquent batraciens et autres petits poissons.
Eux non plus ne rigolent pas avec nos frogs ! Leurs attaques sont tout aussi violentes, malgré leur taille plus modeste.
Durant notre séjour c’est une moyenne de 5 à 6 poissons des deux espèces que nous réussirons à capturer chaque jour, essentiellement le matin jusqu’à dix/onze heure et le soir 1 heure à 1h30 avant la tombée de la nuit. Les perches de jungle seront également de la fête ! Parfois isolés ou bien dans les chasses surprenantes qui éclatent ici et là mais d’une façon spectaculaire. Un véritable bouillonnement assez bref mais très intense façon bonite !!!
Avec des petits leurres à truite façon Ryuki, ça déménage pas mal non plus !
Et puis ça occupe quand la température monte et que les snakehead ne répondent plus.
Le quatrième jour, c’est une prise plutôt étonnante qui a failli nous faire rentrer dans la légende !! Un lancer un peu raté de ma part a coincé ma frog dans une souche d’arbre. C’est un singe intrigué par mon leurre qui s’approchera pour observer ma grenouille, la saisira avec ses mains pour l’ausculter, la sentir, pour finalement la jeter négligemment à l’eau. Trop un goût de pétrole à son sens…
Si si c’est vrai ! Preuve à l’appui. Il s’en suivra une partie de rigolade mémorable de laquelle mon short gardera les stigmates !! Pisser de rire ça arrive j’en ai eu la preuve !
Chaque jour qui passe est un régal, la nature ici est magique, la faune sauvage est omniprésente, singes, oiseaux, cerfs, éléphants, sangliers et autres reptiles nous régalent tous les jours. C’est un spectacle quasi permanent… un véritable dépaysement !
Quant à la pêche en elle-même elle nous ravit ! Même si la période n’est pas propice c’est quand même 27 snakeheads qui viendront se faire prendre pour la plupart au Top-water, le pied !!
Si l’aventure vous intéresse vous pourrez contacter Mick qui se fera un plaisir de vous organiser votre séjour en toute confiance pour un prix, au vu du pied qu’elle procure, tout à fait raisonnable et sans mauvaise surprise !! J’insiste là dessus. Du sauvage à l’état pur !
C’est déjà la fin il est temps pour nous de rentrer sur Bangkok et puis de retrouver notre Bretagne.
C’est une évidence j’y retournerai !
Petit précision technique pour une bonne approche de la pêche au snakehead :
Ce que j’aime par dessus tout c’est la frog. Pas toujours le plus efficace, mais tellement sympa. Soit en dur avec hélice en tête ou façon popper, soit en souple. J’y ajoute un petit triple sur l’hameçon texan façon hameçon chance sinon adieu les papattes et au revoir le poisson… ça marche au top !
Ramenées le plus plus vite possible, elles déclenchent des attaques plus que spectaculaires.
Pour le reste, poissons nageurs (principalement jerkbaits, crankbaits, et autres spinnerbaits) ramenés également rapidement, ils sont tout aussi voir plus efficaces mais tellement moins jouissifs…
Pour ma part j’utilise deux cannes casting de la série Megabass Destroyer.
Une F5 et une F2 suivant la configuration de la berge. La F2 pour les zones de shallow et la F5 pour les bordures encombrées par les arbres morts et autre bosquets de bambous encore immergés.
Une bonne tresse en 20 lb sur la F2 et 50 lb sur l’autre. Pas de bas de ligne acier, mais un bon 40/50 centièmes de 60 centimètre de longueur de fluorocarbone, simple mais costaud !
Pour le reste à vous de jouer !
2 comments
BONJOUR,
Le contact de Mike m’intéresse aussi.
si quelqu’un à la réponse !
Salut,
Je vais pêcher à kahosok avec mon fils ,
J ai vu ton récit sur le lac, il est formidable.
Il y a 6 ans je suis allé dormir sur les petites maisons en Bambou et je me suis juré de revenir avec les cannes en plus mon fils Théo.
Pourrais-tu m envoyer le contact de Mike pour la session pêche.
Merci