Par Lionel Grou
L’aspect extérieur d’un leurre conditionne chez le pêcheur un réflexe d’achat. Si le leurre vous paraît beau, technique ou nouveau, alors il a vos faveurs. Franchement, vous achèteriez une voiture sans soulever son capot, uniquement parce que la forme et la couleur vous plaît ? Bien sûr que non ! Alors faites la même chose avec vos leurres et vous éviterez bien des déceptions… Suivez le guide pour une plongée en immersion dans l’univers de la « mécanique » du leurre : ce qu’ils ont sous le capot !
Nous avons trop tendance à faire de l’anthropomorphisme. Nous choisissons des leurres pour nos poissons sans jamais leur demander leur avis. Nous pensons que les couleurs, les tailles ou les formes ont une importance capitale, finalement ces facteurs ne prennent qu’une importance secondaire et ils méritent dans notre approche ici même, de les ignorer. Ce qu’un leurre a sous le capot, ce qu’il a dans le ventre est bien plus important. Ce sont dans les entrailles même du leurre que vont se situer les réponses à vos questions : se lance-t-il bien ? Plonge t’il vite ? Comment l’animer ? Comment réagit-il ? Un rapide coup d’œil par transparence au travers d’un leurre vous renseignera sur les aptitudes de votre futur jouet.
Les systèmes sonores
Le plus souvent, une bille est enfermée dans un habitacle restreint dans lequel elle heurte les parois, le leurre servant de caisse de résonance. Métalliques, en verre ou en tungstène, ces billes possèdent des sons de différentes tonalités selon leur taille et le volume du leurre.
Certains fabricants combinent plusieurs matériaux et plusieurs cloisonnements dans le leurre. Si vous ouvrez un Baby Griffon, vous remarquerez qu’un grand nombre de billes a été placé. Elles frappent sur les parois, mais elles se heurtent également entre elles pour donner des sons irréguliers.
Les transferts de masse
Destinés à la fois atteindre de plus grandes distances de lancer, à accroître la précision de ces derniers, mais aussi à stabiliser la nage du leurre ou à la désaxer, ces systèmes sont de plus en plus répandus.
La plupart du temps, une ou deux billes métalliques migrent dans la queue du leurre pendant le lancer de façon à mettre un maximum de poids en queue en vue de la projection. Le leurre part alors comme une fléchette, le poids à l’avant. On obtient dès lors une nette diminution des forces de frottement dans l’air car le leurre est stabilisé pendant le vol. Le gain en matière de distance est indéniable, mais pas autant que la précision, qui elle s’en trouve grandement améliorée.
Généralement, ces billes repartent ensuite plus au centre du leurre pour répartir le poids plus bas et ainsi l’équilibrer.
Les transferts de masse trouvent leur utilité avec les leurres à bavette, très résistant aux frottements de l’air. Les bavettes freinent les leurres et ont tendance à les faire tournoyer de façon incompatible avec une bonne précision et de bonnes distances. Pour contrer ce phénomène, les bons minnows sont presque tous équipés de transfert de masse. Avec leurs formes longilignes, ils valorisent pleinement ce procédé.
Cas particuliers
Quelques concepteurs ont imaginé des transferts de masse mobiles participant au système sonore. Aujourd’hui, sur de nombreux minnows, les billes servant au transfert s’entrechoquent lors des twitchs ou des jerks. Quelques crankbaits comme les Deep X Megabass possèdent un système particulier. Une grosse bille migre vers la queue lors du lancer, puis bascule jusque dans la tête du leurre pour faire du bruit et rééquilibrer le leurre « tête en bas » pour augmenter sa vitesse de plongée en donnant plus d’angle au crankbait. Ce système ingénieux incarne 3 fonctions : sonorité, distance/précision, rééquilibrage.
Aujourd’hui le transfert de masse est utilisé par la plupart des grands fabricants de leurres avec plus ou moins de maîtrise. Si Megabass fait figure de leader dans le mariage du transfert de masse et de l’équilibrage, que Duo est une référence en terme de distance de lancer, la société Zip Baits a approché le transfert de masse sous un autre angle, non moins intéressant. La réputation de Zip Baits réside dans ses leurres silencieux qui ont maintes fois prouvé leur intérêt sur les gros poissons et les carnassiers difficiles. Le défi pour eux était donc de réaliser un système de transfert de masse silencieux.
En utilisant un système de piston magnétique coulissant sur un axe, Zip Baits a réussi son pari et les résultats sont étonnants. Ils se permettent même le luxe de sonoriser ou d’insonoriser des modèles identiques (rattler ou non-rattler).
Système d’équilibrage (fixe)
Avec des modèles en balsa, la densité de chaque leurre était la même, leur équilibre dans l’eau également. Mais les leurres modernes peuvent être équilibrés comme le concepteur le désire. Ce facteur ouvre des horizons infinis en matière d’équilibrage interne et donc de créativité.
Les inserts métalliques placés bas dans le leurre permettent des récupérations ultrarapides sans risque que le leurre ne décroche ;
Yuki Itö a conçu pour Megabass 2 modèles utilisant une ingéniosité de sa création : le shaft balancer. Une fine tige de tungstène parcoure la quasi-totalité du corps du leurre dans sa partie la plus basse. Le Vision 95 et le Flap Slap en sont équipés et se désaxent à chaque twitch pour revenir en position normale tout en ondulant latéralement (mouvement de balancier). Le leurre bouge et ondule alors sur lui-même !
Le système s’est révélé tellement surprenant que Yuki Itö, remarquant que son système tenait parfaitement les récupérations soutenues, décida l’utiliser à nouveau pour des crankbaits. Il lança alors sur le marché la désormais célèbre série des Cyclones (SR-X et MR-X).
Il en existe encore d’autres !!
Lors de la seconde partie de cet article, je vous parlerai encore de ces systèmes ingénieux qui ont révolutionné la pêche moderne aux leurres. Il en existe beaucoup, certains sont de véritables farces marketing, d’autres moins médiatisées sont carrément révolutionnaires.