La prise de ce brochet géant représente beaucoup pour moi, je la vois comme la fin d’un chapitre de ma vie ou encore, comme la concrétisation d’une traque. Parler de ce coup de ligne sans retracer un minimum le parcours qui l’a permis ne serait pas lui rendre hommage et j’y ai voué tellement d’énergie que je préfère perdre quelques lecteurs en route en faisant un peu d’historique avant d’en venir à l’essentiel. Ainsi, ceux qui liront l’entièreté de ce récit auront un aperçu de la passion qui m’a animée ces 9 dernières années pour me mener au poisson en question.
Le véritable début de cette histoire fut l’année 2015, je suis alors en faculté de biologie et l’acquisition du permis de conduire me permet d’élargir mon terrain de jeux et notamment de pêcher de nouveaux secteurs sur la Loire, fleuve sur lequel j’ai fait mes armes. À cette époque, il paraissait beaucoup moins courant qu’aujourd’hui de prendre un brochet de plus de 100 centimètres et seuls quelques rares spécialistes y parvenaient plusieurs fois dans la même année. Du haut de mes dix-neuf ans, tout cela me paraissait difficile à atteindre et j’étais convaincu de ne pas vivre au bon endroit pour réaliser ce qui m’apparaissait comme un fantasme: prendre un jour un brochet du mètre. J’étais quand même déterminé à tenter l’aventure et grâce à mon frère Charlie et Ultimate Fishing, j’acquis ma première Tenryu cette année là, une BC 73 XH qui m’ouvrit les portes du big bait. Finalement le fameux brochet d’une vie n’était pas si loin et après plusieurs mois d’acharnement, je pris mon premier métré. À ce moment là, je compris que ce n’était pas un aboutissement mais seulement le début de l’aventure et je rêvais à plus grand. Puis, les années passent, les poissons du mètre s’enchaînent, les records tombent passant à chaque fois un cap que j’imagine difficile à battre : 105, 110+, 115+, 120+, 125+ et peut-être un jour 130+ ? J’en rêvais mais il s’agit d’un gabarit qui nécessite pas mal de chance / réussite tellement les probabilités de croiser la route d’un tel poisson dans le publique sont faibles.
Et de la réussite, en ce début de saison 2024, j’en ai eu une belle dose !
Venons en aux faits: nous sommes le 19 mai, Mélanie est en compétition sur le lac du Grand Large et je ne peux compter sur elle pour m’accompagner en kayak sur le lac Leman. En effet, j’ai désormais la chance de vivre assez proche du lac et de pouvoir y aller régulièrement en kayak. C’est donc Louis, son assistant en communication qui m’accompagnera, l’occasion de partager notre première session ensemble, c’est également une première pour lui sur le grand lac.
Premier constat, l’eau est encore froide, je n’avais jamais mis les pieds au Leman au mois de mai et nous y trouvons une eau à quatorze degrés d’une grande clarté ! Nos deux kayaks sont équipés d’une sonde Livescope nous permettant de rechercher les poissons pélagiques. C’est une approche qui nous a beaucoup réussi l’an passé et nous commençons donc par une prospection entre le premier cassant (environ 10 mètres de profondeur) et le large. Après environ quatre ou cinq heures de prospection, nous sommes dans le dur. Nous repérons très peu de poissons et les rares que nous attaquons suivent timidement les leurres. Un seul gros fera trembler Louis en suivant son Balam jusqu’à la coque de son kayak !
La zone que nous pêchons est remplie de perches entre les herbiers les plus profonds et le début de la zone de cassure. Je trouve étonnant de ne pas trouver plus de brochets que cela tournant autour de ces bancs. Ainsi, en fin d’après-midi, nous discutons et je dis à Louis que l’eau étant fraiche, peut-être que les brochets ne sont pas côté large mais plutôt entre la bordure et les derniers herbiers entre deux et quatre mètres de profondeur. En effet, à cette époque de l’année les grands brochets sortent tout juste de fraie sur le Leman et l’eau étant froide (et donc oxygénée), ils n’ont pas vraiment de raison de gagner les profondeurs tout de suite.
Je suis un peu dubitatif mais au fond, j’en ai un peu marre d’avoir les yeux sur l’écran du sondeur et je me dis qu’une ou deux heures à faire passer mon Balam au-dessus des herbiers ne seront pas désagréables et me permettront de tester ma théorie. Je m’approche donc des herbiers et effectue mon premier lancer. Le leurre tombe, je mets cinq ou six tours de manivelle et je me fais stopper net. Dès le ferrage, j’aperçois brièvement le poisson et l’estime autour d’un mètre dix. Puis il plonge, me met la canne dans l’eau et me sors 5-10 mètres de tresse, une fois, deux fois, trois fois … Je regarde Louis et commence à remettre mon estimation en question mais je me dis aussi que peut-être qu’avec la fraicheur de l’eau, les poissons se battent mieux qu’en été ce qui expliquerait la puissance de combat. Je finis par me dire qu’il est temps d’abréger et ferme un peu le frein pour tirer sur le poisson. Je force mais le poisson ne monte presque pas, il a passé le cassant et a désormais plus de place pour se battre. J’ai le coeur qui s’accélère car j’ai monté suffisamment de métrés au kayak pour savoir que celui-ci ne fait définitivement pas « seulement » plus d’un mètre dix. Après une, voir peut-être deux minutes de combat, il finit par crever la surface, et rentre gentiment dans l’épuisette. On est heureux et je tape dans la main de Louis. On pense avoir un beau poisson de plus d’un mètre vingt !
Rapide séance photo puis j’attrape la réglette et me rend compte en la dépliant que le poisson qui se trouve dans l’épuisette à côté est long, très long. Je l’attrape et le dépose dessus et là, je n’en reviens pas, la réglette qui s’arrête à cent trente centimètres est trop courte ! Il dépasse seulement de quelques centimètres, mais il dépasse !
Difficile de dire si le poisson mesure un mètre trente-trois, trente-deux ou trente et un. Peu importe, l’important est qu’il reparte en pleine forme et nous perdons pas de temps pour le remettre à l’eau. L’eau est fraiche, le poisson n’était pas dans de grandes profondeurs au moment de l’attaque, il repart donc en pleine forme.
Cette action de pêche fut un véritable rêve éveillé et je souhaite à tout passionné de vivre quelque chose de similaire un jour ! Neuf ans en arrière, je n’aurais jamais imaginé finir par prendre un poisson pareil sur le lac Leman. La morale de cette histoire est qu’il faut toujours y croire, faire de son mieux et surtout, être patient. En mettant un maximum de chances de son côté, un jour, les planètes s’alignent et le rêve se réalise ! J’espère que ce n’était pas la dernière fois que je battais mon record brochet mais, même si c’est le cas, j’en serais à jamais satisfait !
J’espère que ce récit vous a plu et qu’il vous inspirera dans la réalisation de vos rêves de pêcheurs ! Pour suivre l’aventure, n’hésitez pas à me retrouver sur mes réseaux sociaux ci-dessous :
👉 YouTube
À bientôt !
4 comments
Extraordinaire quête en effet, on n’imagine pas le temps passé à étudier les comportements, les conditions, les postes, les attitudes … Sans parler des bredouilles, les remises en question quand ça ne marche pas…Des heures et des heures au bord de l’eau, puis un beau jour, l’impossible se produit.
La pêche est riche d’enseignements, de partage et de passion, encore bravo à toi pour ce géant.
Effectivement, cette quête ressemble plus à un mode de vie qu’à une passion, merci Willy !
récit très intéressant. j’espère que tu en prendra encore plus grand et moi aussi d’ailleurs.
Un grand merci Maxime, j’espère pouvoir revenir sur cet article un jour !