J’ai découvert la pêche au crankbait et acquis ma confiance dans ce type de leurres quand je pêchais très régulièrement en eau douce. Depuis une bonne dizaine d’années je pêche beaucoup moins en rivière et en lac mais beaucoup plus en mer et j’ai été étonné de voir que ces leurres si efficaces étaient très peu présents dans les boîtes de pêcheurs en mer. Pourtant j’ai eu très rapidement des résultats sur les bars en les utilisant comme je le faisais auparavant quand je cherchais les perches ou les brochets et aujourd’hui cette famille de leurres a pris une place importante dans les boîtes que je consacre à la pêche du bar. Ceux d’entre vous qui me suivent régulièrement savent que j’en ai parlé sur le blog, les réseaux sociaux ou en vidéo ces dernières années mais je n’avais jusqu’à présent pas pris le temps de consacrer un article complet concernant mon retour d’expérience sur leur utilisation pour pêcher le bar. C’est ce que je vais essayer de faire ici au travers d’une série de 3 articles. Je vous laisserai évidemment compléter ces informations par des renseignements auprès d’autres pêcheurs qui pratiquent la technique car mes conseils demandent évidement à être complétés et même confrontés à d’autres expériences de pêcheurs en mer.
partie 1 : introduction à la pêche du bar au crankbait (lecture en cours)
partie 2 : bavettes arrondies ou bavettes carrées, quels modèles choisir ?
partie 3 : canne, moulinet, ligne, hameçons… quel matériel pour pêcher au crankbait (bientôt disponible sur le blog)
PARTIE 1 : INTRODUCTION A LA PECHE DU BAR AU CRANKBAIT
Commençons par le commencement : un crankbait c’est quoi ?
Ce leurre (presque toujours flottant) est un poisson nageur doté d’une bavette qui va se mettre en opposition à l’eau lors de la récupération ayant pour effet de faire plonger le leurre sous la surface. Il se distingue des autres leurres de la famille des poissons nageurs par un corps assez haut et une bavette particulièrement large qui propose une grande surface de contact à l’eau.
Le nom de ce leurre dit beaucoup sur sa façon de l’utiliser. En anglais « to crank » signifie « tourner la manivelle » et c’est bien ce dont il s’agit. Avant toute autre chose un crankbait c’est un leurre à ramener au moulinet et dont l’action de nage se suffit à elle même. En d’autres termes c’est un type de leurre qui ne demande pas à être animé à la canne pour donner une illusion de vie ou déclencher l’agressivité des poissons.
Un simple lancer ramener est une base suffisante pour avoir un leurre qui nage bien et qui prend du poisson. Cette famille de leurre est curieusement sous-représentée en France et presque inexistante chez nos pêcheurs en mer. Pourtant, ailleurs dans le monde les crankbaits font partie des leurres les plus appréciés, tant pour leur efficacité que pour leur facilité d’utilisation et donc leur accessibilité aux pêcheurs de tous niveaux, confirmés comme débutants.
Ci-dessus une photo de Loan (le fils de ma compagne) que j’initie à la pêche au leurre depuis 3 saisons et qui a capturé une partie de ses premiers bars en lançant et en ramenant tout simplement un crankbait sur les postes que je lui indiquais… Un jeu d’enfant je vous dit !
Bon ok je l’aide à choisir le bon modèle et je lui dis où lancer mais quand même… au final c’est bien lui qui les attrape. Et franchement, au début je pense que ça aurait été beaucoup plus compliqué de lui expliquer comment utiliser correctement des leurres d’autres familles pourtant bien plus courues des pêcheurs de bars.
L’importance de la profondeur de nage du leurre.
Un crankbait c’est aussi un leurre qui se distingue par une profondeur de nage donnée à laquelle il évolue durant une grande partie de la récupération. Les premiers mètres vont lui permettre de descendre à sa profondeur de nage et il la conservera durant une très grande partie de la récupération.
Cette profondeur est déterminée principalement par la surface et l’orientation de la bavette du leurre. Certains sont conçus pour évoluer juste sous la surface voire presque au contact de celle-ci alors que d’autres sont fait pour plonger très profond, pour certains à plus de 6 m. Cette profondeur de nage est vraiment un élément clé dans la pêche au crankbait. Une fois qu’on a trouvé le leurre qui nage à la profondeur où les poissons sont présents et se nourrissent on est assurés de pêcher systématiquement dans la bonne couche d’eau. A l’inverse, si on n’enregistre pas de touches il ne faudra pas s’entêter à pêcher avec le même leurre pendant trop longtemps alors que les poissons sont peut être présents à l’étage du dessus ou du dessous. Il sera donc nécessaire de disposer de plusieurs modèles qui évoluent à différentes profondeurs pour chercher celle où les poissons sont actifs ou encore pour s’adapter à la profondeur de la zone si on prospecte un secteur où celle-ci est variable…
La plupart des fabricants indiquent la profondeur de nage théorique de leurs crankbaits. Théorique car celle-ci dépend en partie de l’orientation de la canne. Canne haute on pourra forcer le crankbait à évoluer plus haut alors que canne basse on pourra le faire descendre dans la couche d’eau. C’est une simple question d’angle entre le leurre et la pointe de la canne.
On pourra même dans certaines conditions se permettre de plonger le scion de la canne sous l’eau pour faire descendre le leurre plus en profondeur. Si vous voulez en savoir un peu plus sur l’orientation de la canne pour pêcher au crank je vous conseille d’aller jeter un oeil à cette vidéo de mes amis Charlie Couchoud et Nico Guichon, il s’agit de pêche en eau douce mais leurs conseils sur la pêche au crank sont excellents et je pêche les bars exactement de la même manière qu’ils recherchent les perches et les sandres.
Une autre chose à prendre en compte vis à vis de la profondeur de nage indiquée est le diamètre de ligne utilisé. Plus votre ligne sera épaisse et moins votre crank parviendra à plonger profondément et rapidement. Le fabricant Zip Baits par exemple indique une profondeur de nage indicative de ses crankbaits pour une utilisation sur une ligne en monofilament de 8 lb de résistance. Selon que vous utilisiez de la tresse, du nylon ou du fluorocarbone (on s’y intéressera dans la partie 3 de cet article) et selon le diamètre que vous aurez choisi, votre crank pourra évoluer plus (rarement) ou moins (souvent) profond que ce que le fabricant vous annonce.
Pour reprendre l’exemple de Zip Baits et des B Switcher (l’un de mes crankbaits de prédilection) le fabricant identifie la profondeur de nage de chaque leurre de la famille à la fin du nom du leurre 1.0, 2.0, 3.0 et 4.0 pour 1, 2, 3 ou 4 mètres de profondeur maximale de nage (d’en bas à droite à en haut à gauche sur la photo ci-dessous).
Si vous venez à vous intéresser aux crankbaits et que vous souhaitez vous équiper, vous verrez que beaucoup de fabricants utilisent également les sigles SR, SD, MR, MD ou encore DD ou DR sur leurs packagings ou dans le nom des produits. Ces sigles vous permettront d’avoir une première indication sur la profondeur de nage des leurres.
SR est utilisé pour identifier la sous-famille des Shallow Runner (ou SD pour shallow diver) c’est à dire les cranks qui évoluent à proximité de la surface et permettent de peigner les zones les moins profondes ou de cibler des poissons qui se nourriraient près de la surface.
MR est utilisé pour la catégorie des Medium Runner qui ne pêchent pas juste sous la surface mais pas non plus très profondément, en quelque sorte les intermédiaires.
DR pour Deep Runner regroupe les gros plongeurs, ceux qui visent la profondeur et vous permettent d’amener un poisson nageur à bavette là où les autres leurres de cette famille ne vont jamais.
Le contact avec les obstacles et le fond
L’un des gros avantages des crankbaits c’est qu’ils passent bien les obstacles, leur grande bavette étant la première à rentrer en contact permet d’écarter les débris ou les substances molles sur les côtés et au leurre de passer sans les accrocher. Sur un obstacle dur, la bavette joue le rôle de déflecteur, son contact avec l’obstacle a pour conséquence de faire basculer le leurre sur le côté et ainsi d’écarter les hameçons de l’obstacle avant que le crankbait ne reprenne sa nage naturelle.
Ces deux actions sur les fonds meubles ou les débris comme sur les obstacles plus durs apportent de la vie à votre leurre, lui donne une action plus erratique et moins prévisible et permet bien souvent de déclencher l’attaque des carnassiers surpris par les vibrations créées lors du contact et par le changement brutal de trajectoire du leurre lorsqu’il bascule sur l’obstacle. Je vous mets une petite vidéo d’une session de pêche du bar au crank en kayak où on voit bien que je cherche cette action de contact sur les rochers.
Bien entendu certains modèles se comportent mieux que d’autres au contact des obstacles (nous le verrons dans la partie suivante) et utiliser un crankbait n’est pas synonyme d’une promesse de ne jamais s’accrocher. Cela dit je pense qu’on ne peut pas parler sérieusement de pêche au crankbait sans mettre en avant cette aptitude si particulière dont de nombreux spécialistes abusent pour déclencher les touches. Une règle pour tirer partie de cette particularité est de choisir un modèle dont la profondeur de nage maximale est légèrement supérieure à celle de la zone prospectée. En faisant varier l’orientation de votre canne (scion vers le haut ou vers le bas) vous pourrez alors choisir de faire évoluer votre leurre juste au dessus des obstacles ou au contraire le forcer à aller à leur contact pour créer des actions imprévisibles et jouer la provocation.
2 avantages supplémentaires à ces leurres à grande bavette
Avant de clôturer la première partie de cet article je voulais revenir sur la surface très importante des bavettes de ce type de leurre. J’ai évoqué plus haut le fait que c’est en raison de cette surface de bavette importante qu’on arrive à donner une action si particulière au leurre lors de la récupération et que c’est également cette surface qui va permettre au leurre d’offrir une grosse opposition à l’eau et de plonger rapidement. Il y a deux autres points qui me semblent importants à mettre en avant et qui concernent cette surface de bavette.
Le premier concerne les pêches depuis le bord. Sur des zones où le courant est marqué (estuaires, sorties de port, goulets d’étranglement, pointes de roches qui s’avancent dans la mer…) on peut lancer son crankbait en travers du courant légèrement dans le sens de l’écoulement de l’eau, puis laisser le courant appuyer sur la bavette pour que le leurre se mette en nage. Vous le sentirez dans la canne. Quand la force du courant est bonne ça permet de prospecter en arcs de cercle presque sans mouliner et de couvrir parfaitement la zone avec un leurre qui décrit une courbe vraiment prononcée et arrive naturellement devant la gueule des poissons sans qu’on ne leur passe la ligne au dessus de la tête auparavant. Il y a pas mal de situations où ça m’a rapporté des belles séries de bars. Cette présentation à l’aide du courant permet un comportement du leurre très naturel et très difficile à reproduire avec d’autres familles de leurres que le courant ne fait pas aussi bien nager ou qui remontent vers la surface du fait de leur manque d’accroche.
Le second concerne les pêches embarquées en faible profondeur (disons moins de 6 mètres) les jours où il y a beaucoup de dérive au vent. Dans ces conditions on est souvent embêté par le vent qui s’engouffre dans la bannière et nous fait perdre le contact avec le leurre, on est alors souvent tenté d’alourdir notre leurre ou notre montage pour essayer de garder un petit peu de contact et de sensation mais souvent on finit par pêcher trop lourd ou trop gros et par perdre en efficacité. Dans ces conditions la grosse surface d’appui de la bavette d’un crank est un gros atout car elle permet un bon point d’ancrage à l’autre bout de la ligne et donc un bon contrôle du leurre. On peut donc continuer à pêcher « petit » et « léger » malgré des conditions météo qui nous poussent trop souvent à faire d’autres choix, pas toujours cohérents. Je me souviens en particulier d’une manche de compétition au nord de l’île de Ré avec Bruno où les poissons étaient dans peu d’eau et où le vent de force 5 à 6 nous faisait dériver à la vitesse de la lumière. C’était franchement très compliqué à pêcher et la plupart des équipes avaient fait chou blanc. On avait réussi en ce qui nous concerne à tirer notre épingle du jeu en pêchant « tendu » et rapide au crankbait et à prendre suffisamment de bars pour remonter au classement et à gagner la compétition grâce à cette approche. J’ai également vécu plusieurs fois cette situation avec des copains lorsqu’une tempête nous forçait à faire le choix d’une zone abritée de la houle (mais pas du vent) comme la rade de Brest ou le fond de baie de Douarnenez pour pouvoir sortir le bateau.
J’espère que cette introduction à la pêche du bar au crankbait vous a plu et que vous aurez pu y trouver quelques renseignements ou idées intéressantes. Dans la seconde partie de cet article qui sera disponible sur le blog dans les prochains jours on s’intéressera aux différences principales entre les 2 principaux groupes de crankbaits, les squarebill (bavette à forme losange) ou les round bill (bavette à forme arrondie).
Si vous avez des questions à me poser concernant la pêche du bar au crankbaits, des retours d’expérience ou des remarques par rapport à cet article, n’hésitez pas à laisser un commentaire.
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5 comments
merci pour ces images sympas sur la pêche !
Salut Nico,
Top cet article détaillé,
J’avais suivi ta video kayak il y a quelques temps, pour l’anecdote j’avais voulu suivre tes traces et tenter la technique (on doit pêcher plus ou moins sur les mêmes spots) et après avoir monté un joli crank, bim, tanké au premier lancer , un crank de perdu!
bref ça m’avait plutôt refroidi sur le moment, mais sur le principe, et la je parlerais d’estuaire, c est vrai qu’il y a souvent de belles pêches à faire le long des tombants (jigs, écrevisse sur texan) sur des poissons postés, mais que, comme tu l’expliques, les forts courant contraignent souvent à surplombé pour faire descendre le leurre vite et précis, ce qui ne favorise pas forcément la présentation, en espérant que les poissons soit à ce moment peu regardant!
Au plaisir de lire la suite,
David
Merci pour l’article, hâte de lire la suite surtout la 3ème partie.. . Content que le sujet ai été abordé, et de belle manière !
Merci Nico pour cet article.
C’est vrai que cette famille de leurre mériterait d’être davantage utilisée en mer. De même que pas mal d’autres types de leurres: swimbaits, chatterbaits…
Cette série d’article, et ce partage d’expériences, vont sans doute être une belle source d’inspiration, pour ceux qui cherchent des alternatives aux leurres traditionnels.
Avec plaisir Fred,
Bientôt les prochains articles de la série 😉