Dans le cadre de mes études en biologie, il m’est accordé deux semaines de vacances en plus au mois de janvier. Cela afin d’avoir le temps d’effectuer un stage pendant les vacances d’hiver. Nous avions donc prévu, avec trois amis de l’université, de partir effectuer un stage d’écovolontariat à l’étranger. En cherchant sur le net et en discutant avec d’autres personnes de la fac, nous étions tombés sur un centre de protection et de réhabilitation d’animaux : la wildlife friends fondation of thailand.
Ce centre a pour but de récupérer des animaux maltraités comme les éléphants, les singes ou encore certains reptiles et ours afin de tenter, si possible, de leur faire ré-acquérir un comportement naturel avant de les relâcher dans les parcs nationaux. Ainsi, nous travaillerons avec les animaux 5 jours par semaines de 6 h 30 à 17 h. Au programme, nettoyage d’enclos, nutrition, création de « jeux » ou encore promenade et nettoyage d’éléphants… Tout cela avec un groupe d’une soixantaine de personnes mélangeant une douzaine de nationalités !
À côté du centre, se trouve un joli petit barrage, comportants des îles où vivent des singes, de nombreuses petites baies et une végétation omniprésente sur les berges et sur l’eau. Vous l’aurez donc compris, tout les soirs après 17 h, c’est à cet endroit que je foncerais.
La Thaïlande abrite une espèce de poisson qui me tente particulièrement, le snakehead ! Cependant, mis à part la description que je vous ai fait ci-dessus, je ne sais rien de plus sur ce lac, je n’ai aucune information sur l’éventuelle présence de snakehead et je n’aurais de toute façon sûrement pas le temps d’aller pêcher ailleurs car la nuit tombe ici à 18 h 30 et comme je vous l’ai dit, je termine le travail à 17 h.
Maintenant que je vous ai décris brièvement le contexte, place à la pêche ! Je tente ma chance dès mon premier soir après le travail. En vain, j’essaie des frogs, des buzzbaits, des jerkbaits où encore des spinners, rien n’y fait, même pas un semblant de touche et aucune chasse à l’horizon… Je me pose des questions sur la présence de snakehead dans le lac, je me lance donc dans une quête à l’information pendant les deux jours suivants durant lesquels je ne pêcherais pas. Il est très difficile d’obtenir des informations fiables puisque les thaïlandais ne parlent pas anglais et que les Occidentaux sur place n’en savent pas plus que moi, la plupart ne connaissent même pas l’espèce, ils me répondent simplement qu’ils n’ont jamais vu ce poisson lorsque je leur montre des photos sur Google. D’après eux, il faut que j’aille dans les centres de pêche des villes d’à côté car ils existent des réservoirs ou je pourrais trouver le poisson que je cherche en échange de 100 euros pour une journée de pêche à l’appât, autant dire que ce ne m’emballe pas du tout. Le moral en prend un coup car même si je ne suis pas là principalement pour la pêche, j’ai beaucoup rêvé de ce prédateur d’eau douce asiatique et je n’aurais pas beaucoup d’opportunités de le pêcher ailleurs que dans ce lac qui constituait un peu mon seul espoir… Profitant d’une des deux journées de repos accordées par semaine, je décide de pêcher quand même toute la matinée car je ne voudrais pas passer à côté d’une belle opportunité à cause d’un jugement trop hâtif du à des informations inexactes sur la présence de l’espèce dans la retenue.
Levé à 6 h 20 je file au bord de l’eau après un rapide déjeuner, le décors est splendide, tout comme l’ambiance sonore, les cris des singes se mélangent avec ceux des oiseaux et viennent presque étouffer les nombreux gobages !
Je décide de changer un peu le type de leurres utilisés car j’essaie de faire un compromis entre l’opportunité de déclencher un potentiel Shakehead où un « catfish » qui sont, eux, d’après le personnel du centre, bien présents. J’alterne donc entre jerkbait de 100 mm et one up shad 6″. Cependant, arrivé à 9 h 30, je n’ai toujours pas pris la moindre touche, les gobages se sont estompés, l’atmosphère brumeuse et magique du matin a laissé place à une chaleur étouffante, j’avoue que à ce moment là je n’y crois plus du tout.
Je commence à penser à faire une courte pause et c’est alors que j’aperçois un petit poisson d’une dizaine de centimètres devant moi… j’essaie de lui faire peur en lançant mon leurre au large pour le rabattre plus proche car j’ai un doute. Ma tentative abouti, il se rapproche, et j’ai comme l’impression qu’il s’agit d’un petit snakehead !
La motivation remonte, je rattache rapidement une frog au bout de mon bas de ligne, ce petit à forcément des parents ! Comme pour me conforter dans mon choix, j’aperçois une magnifique chasse, il y a sûrement du snakehead dans le coin !
J’insiste donc, la frog frôle les tapis de plantes aquatiques, passe sur les nénuphars et je prends soin de bien poursuivre la récupération jusqu’au bord car je me souviens des mots de mon ami Elliott à propos de la pêche du black bass à la frog « ils attaquent parfois là où on s’y attend le moins « , il n’y pas de raison que ce soit différent ici …
Après une demie heure, toujours pas d’attaque, la zone où j’avais vu la chasse n’est accessible qu’en passant par la propriété de paysans thaïlandais… j’hésite quelques minutes, je commence à y aller, puis fais demie tour, je me dis que en Thaïlande cela peut être très irrespectueux de pénétrer une propriété privée et je ne veux pas poser de problèmes… Je finis ensuite par me dire que c’est trop dommage et que je dois prendre le risque, c’est décidé je vais passer rapidement et discrètement. J’arrive proche de la zone ou j’avais aperçu la chasse.
Les lancers s’enchaînent, ma frog survole des nénuphars et arrive à quelques mètre de moi quand je me fais surprendre par une véritable explosion ! Concentré, j’attends peut être une où deux secondes et envoie un puissant ferrage, la canne cintre, c’est au bout ! S’en suit de violents rush, ce poisson a une force incroyable, tremblant, je finis par l’échouer contre le bord … C’est un superbe snakehead d’une soixantaine de centimètres, je le tiens enfin !
J’admire pour la première fois cette beauté préhistorique qui porte plus que bien son nom ! Après une rapide séance photo, je le relâche puis s’en suit un immense rire de joie, quel souvenir !
Après cette session, tout change car désormais, je sais qu’il est possible d’attraper ces poissons ici, de plus, j’ai trouvé une superbe baie peu profonde où ils semblent chasser. Je suis à ce moment-là sur une autre planète car tout se combine parfaitement bien, la pêche, le travail, les soirées avec les membres du centre, bref, je ne pouvais espérer mieux ! Le lendemain soir, je retourne donc dans la même baie que la veille, je suis accompagné de Maxence, un de mes amis non pêcheur qui est déterminé à filmer la capture d’un snakehead. A peine arrivé sur le spot, une superbe chasse éclate, aussitôt je lui dit d’allumer sa caméra et je jette en plein dans la chasse … quelques animations plus tard, grosse attaque…
Malheureusement le poisson a raté la frog, c’est dommage mais nous sommes confiants pour la suite. C’était sans compter sur le cauchemar qui a suivit : mon moulinet casting se bloque lors d’un lancé et deviens par la suite inutilisable, la manivelle ne tourne que par à-coups… je n’avais jamais vécu ce type de problème et ne possède pas les clefs nécessaires au démontage, j’attends donc le lendemain pour voir avec le personnel du centre. Ainsi, je parviens à l’ouvrir mais pas à le réparer. Je commence à me faire à l’idée que la pêche est terminée pour moi car le magasin de pêche potentiel le plus proche est à 45 minutes de voiture et je ne suis pas sûr de pouvoir trouver un casting avec manivelle à gauche car les thaïlandais, comme les américains, moulinent avec la main droite. J’écourte un peu la suite mais je finis par avoir un créneau qui ne dérange pas trop mes amis et je peux prendre un taxi jusqu’au magasin, sur place je trouve un shop plus que complet et un plein rayon de « left hand », génial ! Je fais donc mon choix et retrouve mes amis au centre pour prendre un autre taxi. En effet, nous avons pris nos deux jours de repos et nous filons au bord d’un grand barrage bordant le plus grand parc naturel de Thaïlande : kaeng kra chan ! Ce qui explique qu’il était indispensable que je trouve une solution pour mon moulinet rapidement…
Il est possible de dormir pour une trentaine d’euros dans de superbes hôtels bien intégrés dans la jungle et par la suite de faire du canoë où de la randonnée. Bien mieux renseigné, je sais qu’il y a du snakehead ici !
Je passerais ainsi une journée et demie à passer de baie en baie, à faire résonner mes frogs et autres buzzbaits dans des spots de rêve !
Malheureusement, je ne l’aurais pas. Je ne verrais qu’un seul poisson qui sera sorti sur l’un des quelques bateaux présents. Un monstrueux giant snakehead qui, je pense, ne devait pas être loin des 90 centimètres… je ferais quand même suivre un beau poisson jusqu’au canoë mais pas d’attaque, peu importe, j’ai eu la chance de pratiquer ma passion dans un endroit de rêve, de voir quel type de poisson l’occupe et je m’estime déjà bien assez heureux.
De plus, je vais retourner au centre, et donc sur le spot tant prometteur…
Mes trois derniers coups du soir furent courts, intenses et géniaux. Je ferais un snakehead par soir dont un magnifique que j’estime à 65 centimètres. Des attaques monstrueuses sur des frogs et des buzzbaits ramenés à toute vitesse, je n’aurais jamais imaginé prendre un poisson de cette façon !
Le voyage se termine ainsi par l’immense satisfaction d’avoir réussi à prendre cette espèce à plusieurs reprises, avec des sujets de taille correcte et tout cela sans me payer un quelconque guide et sans avoir pêché dans un réservoir. Je ne dis pas cela pour me jeter des fleurs mais tout simplement car pour moi, c’est comme cela que la pêche doit se vivre, par ses propres moyens, analyses et réflexions. Cela permet de donner tellement plus de valeur aux prises, mais aussi de rencontrer plus de personnes, de tester nos capacités d’adaptation et nos nerfs qui sont mis à rude épreuve par l’incertitude et l’envie de réussir !
Je conclue donc le récit de mon voyage en invitant tous les passionnés de pêche en eau douce et plus particulièrement les pêcheurs de black bass à tenter un jour le snakehead, dépaysement garantit au niveau environnement comme au niveau technique de pêche ! N’ayant que très peu traité l’aspect technique et matériel dans cet article, je vous invites à laisser vos potentielles questions en commentaires ci-dessous, je tenterais si possible d’y répondre.
A bientôt !